C'est la rentrée pardi, et le Nomade pédagogique a plongé le nez dans son cartable, viré l'excédent de paperasses qui l'encombrait,
vérifié cahier et clé usb. Bon, paré pour demain, et la découverte d'un nouvel inspecteur. En attendant de plus amples nouvelles, j'ai envie de partager avec vous cet excellent sonnet repéré par
le non moins excellent Philippe Didion. Il y
avait trop longtemps que nos amis ruminants n'avaient point été évoqués dans ce blog.
(Ci-contre : Vaches tasonnes de Jean-Michel, à qui nous avons eu le plaisir de rendre visite en ce mois
d'août)
Les grands boeufs harcelés par le gel qui massacre
Les mares autour d'eux et la haie somnambule
Et l'herbe malfaisante et barbare à fouler
Dorment, fesses serrées, cornes nues, sous la lune.
N'aie pas peur de leur masse respirante, ils dorment.
Je connais un talus bien abrité, le saule
Y frémit, sans répit comme un coeur végétal.
Viens, écartons l'espace où nos ombres se fondent.
Vite, donne-moi tes lèvres, j'ai si soif d'elles.
Laisse mes doigts chercher ta robe, ton corsage,
Ce bruissement de jais qui est la vie en toi.
Toute la nuit d'hiver étincelle... la prairie
Et le ciel et les bois étoilés de hiboux.
Ah ! Laisse-moi saisir tes seins, pareils au gel !
André DRUELLE, La Terre est en sève, Sagittaire, 1936, p. 144.
Pour en revenir à Didion, la preuve que c'est un gars bien, c'est qu'il est venu passer ses vacances en Creuse, vers Aubusson. Et ça, c'est méritoire. D'autant plus
que c'est une récidive :
"Transhumance. Le gilet Bons Mayennais est dans la boîte à
gants, mon drap de bain Bons Mayennais est dans ma valise. Vêtu de mon t-shirt Bons Mayennais, je consulte ma montre Bons Mayennais : il est 8 heures 30, top départ.
Huit heures plus tard à la même montre, le gilet n'a pas servi, le tee-shirt est recouvert d'un bon pull et le drap de bains semble un bagage superflu. Nous arrivons dans la Creuse sous une pluie
battante. Pas de plaisir de la découverte cette fois, nous sommes au même endroit que l'an passé, un chalet en plein désert. Rien n'a changé, j'ai tout revu, l'humble terrasse avec les chaises de
plastique, le jet d'eau fait toujours son murmure argentin et le vieux tremble sa plainte sempiternelle. Le soleil revient, pailletant chaque fleur d'une humide étincelle, premier coup de pêche,
premiers poissons, vacances."