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16 octobre 2016 7 16 /10 /octobre /2016 10:16

Il s'appelait Michel Van Grevelinge, et comme son nom le laisse soupçonner ce n'était pas un berrichon pur souche. Il était arrivé dans l'Indre un peu par hasard, après avoir vécu à Paris, du moins c'est ce que je crois me rappeler des trop rares conversations que nous eûmes ces dernières années. Professeur de français vacataire, il vivait dans une petite maison près de Lourdoueix Saint-Michel. Invité à quelques rassemblements tasons, il était devenu un de ces amis de passage que nous avions plaisir à retrouver.

Je me souviens de l'une de ces fiestas à La Forêt du Temple, où il squatta les platines aux heures indues où les coqs commencent à chanter. Ses goûts musicaux n'allaient pas vers le bel canto, non, il aimait la musique techno, tendance dure. D'ailleurs je découvris qu'il avait même écrit un ouvrage très complet sur la question, Profil Hardcore, publié aux éditions L'Harmattan en 2010.

profil hardcoreEn googlisant son nom, j'ai surtout retrouvé des références à ce livre. Mais aussi la trace d'un article que j'avais écrit sur le blog des Misérables 62, que je tenais en 2012 au moment où je montais la pièce à Cluis. Cela s'appelait Les fentes de l'espace ; je commençais ainsi : " Michel Van Grevelinge m'a gentiment apporté hier soir deux volumes des Oeuvres Complètes de Victor Hugo, publiées en 1967, au Club Français du Livre, sous la direction de Jean Massin. Ils renferment la totalité des dessins de Hugo (deux bons milliers), et c'est un enchantement. J'en extrais ici quatre, réalisés alors qu'il écrivait Les Misérables."

Et je terminais avec cette évocation du Hugo des ruines :

"Je me plais à penser que Hugo eût aimé que son œuvre prenne place et sens dans le cadre de ruines, lui qui en traça si souvent les contours déchiquetés, en exalta la face ténébreuse.

hugo Une même lune pleine jetait hier sa pâle clarté sur le spectacle, à jardin, à l'extrémité des murailles, au-dessus de l'arbre où Valjean apparaît pour sauver Cosette. Gaëtan Picon, dans sa préface, écrit que "l'univers de ces dessins est un univers de profils ajourés, évidés, surgissant sur le vide,ou sur la plénitude d'une nuit irradiante. Monde fêlé, mangé, que dans la Légende des Siècles évoque magnifiquement cette Epopée du ver qui est l'un des plus sûrs commentaires de l’œuvre graphique, monde où la clarté ne peut paraître qu'au travers des étais d'une ruine :

"Le point du jour blanchit les fentes de l'espace,
Et semble la lueur d'une lampe qui passe
                      Entre des ais mal joints."

C'est aussi au point du jour, à l'aube d'un jour sans doute trop grand pour lui, dans l'effroi d'une immense solitude, que Michel s'est donné la mort. A tous ses proches, à tous ceux qui l'ont aimé, nous voulions dire ici notre très grande tristesse.

Merci à Christophe Bailly, qui le premier m'informa de cette terrible nouvelle, Christophe qui fut le passeur entre Michel et nous.

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commentaires

L
J'ai rencontré Michel il ya 33 ans,je venais d'arriver à Beauvais dans l'Oise j'étais un peu perdu,il a été d'une grande tendresse avec moi, c'était quelqu'un d'hors norme pour qui j'avais beaucoup d'admiration.<br /> J'arrive pas à croire qu'il se soit donner la mort.y'a t'il quelqu'un qui pourrait m'en dire un peu plus?
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C
Bonjour,<br /> <br /> Magnifique hommage, très proche de mes souvenirs.<br /> Merci pour cette précieuse réminescence.<br /> <br /> Bien à vous, je partage la tristesse.
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M
Merci Patrick pour cet article....jai ete tres peine dapprendre cette terrible nouvelle hier .....
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