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14 avril 2015 2 14 /04 /avril /2015 20:34

       J'avais dix ans quand la France se couvrit d'affiches vantant l'Ordre nouveau de la nouvelle Europe. Celles-là, dans mon souvenir, sont brunes. Couleur de l'uniforme de l'aryen blond au menton carré qui y souriait ? Jaunes étaient, à cette époque, les étoiles que portaient sur la poitrine certains de mes camarades de classe. Cette Europe-là me laissa de rudes cicatrices. Mes parents, mon frère aîné, luttaient contre elle. Sur la carte placardée au mur, des épingles à têtes multicolores reliées par un fil de laine brouillèrent l'image du continent en superposant aux frontières un réseau de fronts, d'offensives, de contre-offensives, de débarquements, de poches et de têtes de ponts.

      En 1944, mon frère fut tué les armes à la main par des Européens couleur feldgrau. Mon père agonisa à Buchenwald avant de partir dans la fumée noire du four crématoire quinze jours avant la libération du camp. Ma mère revint de Ravensbrück. Ses cheveux commençaient à peine à repousser, gris. L'Europe avait pris pour moi la couleur et l'odeur de la mort.

François Maspero, Balkans-Transit, Seuil, 1997, p. 9-10.

Pigeons de Chenonceau

Pigeons de Chenonceau

Je n'écris plus ici, lassé de la contrainte que je m'étais donnée. Ce qui ne veut pas dire que je n'écris plus, loin de là. Mais ce que j'écris maintenant ne peut être publié de suite, cela demande à mûrir, cela réclame du temps. Et c'est sans garantie, comme un vin qui ne serait pas destiné à la garde, qui va simplement se gâter, finir vinaigre avant l'heure. La photo n'est pas du jour, prise un jour de froid et de bruine à Chenonceau, que je faisais découvrir aux étudiantes espagnoles, reparties depuis une semaine déjà vers une terre moins frileuse, leur Grenade andalouse. Les pigeons se blottissaient sous les arcs des fenêtres, dans les angles protégés des toitures, indifférents aux touristes. Leurs chiures faisaient affront aux dorures.

D'ici, de son cabinet vert minuscule, ouvert sur les courants du Cher, Catherine de Médicis dirigea la France. Je trouvai ça fascinant.

Ici passait pendant la Guerre la ligne de démarcation. Par la grande galerie, des hommes et des femmes gagnèrent la liberté, avec la complicité du propriétaire d'alors. Une batterie allemande resta pointée sur Chenonceau pendant tout le conflit.

Se battre toujours. Et je songe, - nous songeons - en cette belle journée d'avril, à celui qui se bat aussi, non loin de la Loire, contre une sale maladie. Etienne, notre ami, qui faisais lever sous tes doigts les images noir et blanc comme des rêves échoués dans les draps de l'aube, nous voulons reparcourir avec toi les chemins de crête de la jeunesse. Nous t'attendons.

 

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22 mars 2015 7 22 /03 /mars /2015 21:09

"Ce contrôle incroyable, comment tu fais ? Je ne m'inquiète pas de l'angle de mon pied parce que c'est quelque chose que je fais tout le temps : je sais comment contrôler presque n'importe quel ballon. Ce que je veux, c'est être hyper stable. C'est une question d'équilibre. Tu dois rester aussi calme et immobile que possible, comme si tu te tenais debout sans bouger... mais en l'air, et en contrôlant le ballon. Si je bouge, le défenseur peut le récupérer. Donc il faut que je le garde sur l'intérieur du pied. Voilà."

Dennis Bergkamp, in So Foot, Hors-série Tactique, Hiver 2015, p. 134.

Mad #67 : Debout sans bouger... mais en l'air

Notre visite mensuelle à Tasonlande coïncidait avec le quart de finale de la Coupe de l'Indre : l'équipe locale - les Verts - recevait Montgivray. Malgré le froid de canard, nous voici accoudés à la main courante. Des années que je n'avais pas assisté à un match dominical et je suis agréablement surpris par l'engagement de cette équipe de jeunes dont je ne reconnais pas un membre, à part le capitaine, le fougueux Tom A.(au centre sur la photo), qui a déjà participé plusieurs fois à nos agapes annuelles dans la foulée de son auguste père (il a même accédé à la distinction suprême, c'est dire).

Je dis fougueux parce qu'à la suite sans doute d'un coup bas, le dit Tom a exprimé sa réprobation à l'adversaire d'une tapette sur le cuir chevelu, geste de rétorsion que, dans sa grande ingénuité, il a commis pratiquement sous les yeux de l'arbitre, ce qui valut fort logiquement à notre Tason un très beau carton jaune, qui ne devrait pas déparer dans sa collection.

2-2 à la fin du temps dit réglementaire, donc prolongations, et risque d'amputation de pieds gelés. Et là, à l'issue d'un effroyable suspense, les Verts arrachèrent la victoire à la dernière minute. Joueurs et public en délire, nous allions enfin pouvoir reprendre nos parties de dames chinoises près du radiateur familial.

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17 mars 2015 2 17 /03 /mars /2015 22:14

"Fils.- Le monde est sur mon visage. Puis derrière mon visage. Un à un, les autres m'entrent par les yeux.

Ceux qui passent sont à l'intérieur, maintenant, et ils voient tout. Mon père fou, enfermé là-haut, ma mère nue, et moi qui pisse au lit. Je ne peux plus rien cacher. Ils me voient tout. Jusqu'aux pensées de mauvais fils. C'est fini.

La place s'est ouverte sous mes pieds. J'ai fermé les yeux, et comme du temps d'avant, quand j'étais mort, le temps d'un petit rêve, j'ai compté jusqu'à dix."

Stéphane Jaubertie, Un chien dans la tête, Théatrales Jeunesse, 2013, p.39-40.

Mad #66 : Le temps d'un petit rêve, j'ai compté jusqu'à dix

Etudiants et élèves mêlés, à l'école Arago, pour l'intervention du comédien et dramaturge Stéphane Jaubertie, dans le cadre d'un partenariat de l'Espe avec Equinoxe, la scène nationale. Du papier, un crayon, un tableau, c'étaient ses seules exigences. Avec cela, écrire du théâtre, et tout d'abord jeter les bases d'une situation dramatique.

Cela prend du temps : il a fallu l'après-midi pour établir, après l'introduction de l'auteur, la présentation de l'activité, l'écriture en groupes et le retour au collectif, deux trames assez solides pour permettre demain matin la construction d'un dialogue. Il a fallu imaginer, discuter, abandonner en cours de route des dizaines d'idées qui ne conduisaient pas à cette nécessité de l'action théâtrale.

C'est que le personnage de théâtre n'est pas mû par la simple curiosité ou la recherche d'un plaisir éphémère. Il agit d'une certaine manière parce qu'il ne peut pas faire autrement, parce que l'attirance ou la peur dont il est la proie l'entraînent sur des sentiers dont il ne fera pas l'économie du vertige. Le talent de Stéphane Jaubertie c'était déjà à cette étape de faire surgir la haute tension que déploie toute pièce de théâtre, qu'elle soit drame ou comédie.

 

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15 mars 2015 7 15 /03 /mars /2015 20:26

"Matin de mars - Espacé parmi le fouillis sonore des oiseaux, le marteau du pic-vert accentue lui-même la sensation de l'espace, un espace recouvré après un long confinement, après une longue constriction des choses. Le printemps frappe à la porte et tous les méats du monde, fluides, se dilatent. Par l'entrebaîllement du pic-vert, on croirait entendre une mer qui monte."

François Cassingéna-Trévedy, Etincelles III, 2006-2009, Ad Solem, p. 105.

St Germain de Confolens

St Germain de Confolens

Il m'a fallu dix jours pour recouvrer le goût d'écrire, le goût de capturer quelques images du monde. Etrangement, car aucun trouble majeur n'est survenu, incident de santé ou déconvenue. Rien apparemment que le souci habituel des jours que chacun connaît dans son existence. Comme si le printemps, malgré la joie que l'on éprouve à la remontée de la lumière et à la résurgence du vivant, portait aussi en lui une subtile désillusion, ou encore révélait la marque obstinée d'un désir insatisfait.

Il m'a fallu ce petit voyage en Charente, dans ce village aimé de Saint-Germain, sur les berges de la Vienne, pour renouer avec l'appétit des mots. Il s'agissait de lectures théâtrales pour un projet estival ici-même, sept jours de répétitions, sept jours de représentations au château-fort et dans les villages alentour : nouvelle mouture d'un projet mené en 2001 en Berry, Festival.

Il a fallu la lumière sur le fleuve, le flamboiement d'un camélia dans un jardin presque secret, les sentiers tortueux sur les pentes du château en ruine ; il a fallu la simplicité et la bonne humeur de ces nouveaux compagnons confolentais pour se remettre pleinement dans le courant de la vie.

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4 mars 2015 3 04 /03 /mars /2015 20:51

Le spectateur

peut-il à travers les morts de la guerre civile

plantés aux quatre coins du monde

devenir son propre spectacle ?

(Une part engoulevent de l'été de l'anarchie

une part alouette montant de la verticale des lieux de la tuerie

une part oiseau migrateur faisant le tour du monde

une part rouge-gorge dans la rigueur hivernale.)

Toujours une part en trop.

 

Armand Gatti, La part en trop, Verdier, 1997, p. 52.

La pie des rives de l'Indre

La pie des rives de l'Indre

A l'heure de l'allongement des ombres, promenade dans la prairie des bords de l'Indre. Ciel vierge de tout nuage, berge vide de tout humain. Juste avant le confluent avec le ruisseau des Tabacs, j'entends un jacassement proche. Arrêt. Le cri reprend. Je lève les yeux et vois dans l'arbre une pie, presque indiscernable dans le lacis des branchages, peu inquiète de ma survenue. Il est vrai aussi que je suis silencieux comme l'orvet quand je croise dans ces parages. Cependant je pense, j'en suis presque persuadé, que je ne lui fais pas peur. Je la filme plusieurs minutes (mais une mauvaise manip a fait rater l'enregistrement, déception). Elle finit par s'envoler un peu plus loin, sans affolement.

C'était juste un court moment de contemplation, avec, en fond, la rumeur de la rivière encore forte des pluies des jours derniers, sur laquelle tranchaient les sons rauques de l'oiseau. Mais c'était suffisant pour nourrir sa vie.

 

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2 mars 2015 1 02 /03 /mars /2015 22:50

"Vous savez qui m'a appris que les juifs avaient une histoire ? C'est Hitler ! Je lisais les journaux, j'écoutais les flots d'injures sur Radio Stuttgart du matin jusqu'au soir à partir de 1933. Je commençais à comprendre que le destin juif, c'était nous, et pas seulement les drôleries du rabbin et le côté vide d'une tradition morte. J'ai désiré approfondir cette histoire qui me venait de loin, à travers ma famille et les événements qui allaient se précipiter."

Claude Vigée, Le fin murmure de la lumière, p. 193, entretien avec Christophe Henning, Parole et Silence, 2009.

Mad #63 : Histoire qui me venait de loin

Le blues hier, après les deux jours de retrouvailles tasonnes. Le traditionnel blues après ces trop courtes heures passées dans la douceur fervente de l'amitié.

Retour aussi au travail après une semaine de vacances. Les violettes en ont profité pour s'épanouir en tapis devant la fenêtre de notre salle à manger. Eclaboussées de soleil, elles étaient pour moi le signe même de l'imminence du printemps. Violette, bien sûr, c'est aussi le prénom de ma petite fille, la résonance n'en est que plus forte.

Mais ce soir, c'est une autre Violette qui est apparue à moi : dans le documentaire de Michael Prazan vu ce soir sur France 3, Une division SS en France, das reich, qui relatait le périple sanguinaire des bourreaux de Tulle et d'Oradour-sur-Glane, était aussi évoquée le destin de Violette Szabo, une jeune femme franco-britannique de 23 ans, agent secret de la section F du Special Operations Executive (SOE). Elle avait déjà exécuté une mission en France, puis avait été à nouveau parachutée dans le Limousin pour coordonner la Résistance. Arrêtée le 10 juin près de Salon-la-Tour par des soldats de la Das Reich qui recherchaient un officier disparu, elle est transférée à Limoges, puis à Paris, où elle est interrogée et torturée. Déportée à Ravensbrück avec Denise Bloch et Liliane Rolfe, deux autres agents du SOE, elles sont toutes les trois exécutées en février 1945, peu de temps avant la libération du camp par l'Armée Rouge.

Lisant la page Wikipédia qui lui est consacrée, je découvre que son histoire n'est pas sans lien avec l'Indre. Car c'est près d'Issoudun ou près d'Arthon (il existe deux versions) qu'elle a repris l'avion pour Londres après sa première mission en Normandie, sous le nom de guerre "Louise".

Et je lis aussi qu'en tant que l'un des 104 agents de la section F du SOE morts pour la France, Violette Szabo est honorée au mémorial de Valençay,

J'aimerai bien y déposer un bouquet de ces jeunes violettes.écloses ces jours-ci.

 

Violette Szabo

Violette Szabo

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20 février 2015 5 20 /02 /février /2015 21:07

"Je me méfie toujours de ceux qui affirment avoir "une haute idée de...". J'aime mieux les idées basses et les mains au charbon. Mon côté soutier."

Antoine Emaz, Cambouis, Seuil 2009, p. 141.

Maison-atelier d'Ernest Nivet

Maison-atelier d'Ernest Nivet

Soutier : "(Vieilli) (Marine) Matelot qui travaille dans les soutes d’un navire, principalement dans le magasin au charbon." Le livre de notes prises au fil des jours du poète Antoine Emaz m'accompagne plus qu'aucun autre. Son titre, Cambouis, est dans la droite ligne de la citation d'aujourd'hui.

Over Blog  souhaite un très bon anniversaire au blog des Tasons : 10 ans aujourd'hui. Surprise. Dix ans déjà. J'ai vraiment du mal à estimer la longueur du temps. Situant un événement dans le passé, il n'est pas rare que je me trompe de cinq à dix ans, voire plus. La fête des 30 ans, il me semble encore que c'était hier, la remontée du ruisseau du Grand-Moulin à travers les prés mouillés, avant-hier. Par pitié, ne soufflons donc pas de bougies. On va continuer comme avant, ni plus ni moins, les mains dans le charbon, la tête dans les nuages.

La photo est d'hier, en fin d'après-midi où la lumière soudain irradiait la rue de la fontaine Saint-Germain, et singulièrement le toit de la maison d'Ernest Nivet, mon sculpteur berrichon préféré, dont le berger allongé est la plus belle représentation de tason que je connaisse (avec la photo du président sur la page d'accueil du site). C'est bien de fêter les dix ans avec lui, et merci à tous ceux qui tasonnent un peu, de temps à autre, ou régulièrement, sur ce site.

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18 février 2015 3 18 /02 /février /2015 23:13

"Plus physionomistes que nous en ce qui les concerne, nos inférieurs frères fourrés savent bien reconnaître à notre attitude, à notre langage, au mouvement de notre face, tous les sentiments que nous leur portons. S’ils connaissaient l’hypocrisie que nous leur prêtons, nous ne pourrions pas les tromper comme le font certaines brutes qui, pour capturer les bêtes,

s’affublent de gestes patelins et se gargarisent la bouche de paroles mielleuses. Jamais un chat ne vous fera le gros dos avant de vous mordre ou de vous égratigner. C’est une bête

loyale comme toutes les bêtes et nous lui devons, nous aussi, la franchise."

 

Vendredi 3 avril 1914.

Louis Pergaud, La vie des bêtes

 

Mad #61 : Loyale comme toutes les bêtes
Mad #61 : Loyale comme toutes les bêtes

Ma curiosité m'a une nouvelle fois conduit à explorer une armoire de l'Espe qui contient quelques trésors. A l'étage au-dessous des Oeuvres complètes du grand Victor, j'ai repéré à côté de La vie des Bêtes de Louis Pergaud, qu'il écrivait encore quelques mois avant sa mobilisation en août 14, un fort volume en cuir relié, intitulé Livre d'or de l'Ecole normale de Châteauroux, guerre 1914-1918. A l'intérieur, les portraits des normaliens tués ou disparus au combat, avec les photographies et des mentions impeccablement calligraphiées. Parmi bien d'autres, j'ai photographié les deux pages concernant Clément Default, natif de Pommiers, et mort à Verdun, "présumé enseveli", le 4 mai 1916.

A cette date, Pergaud était déjà mort, disparu lui aussi, le 6 avril 1915, à la suite d'une attaque contre les lignes allemandes, aux Eparges, près de Verdun. Lui aussi avait été normalien, reçu à seize ans, premier au Concours d'entrée.

Clément avait vingt-huit ans à sa mort, Louis, trente-trois. Tous les deux partis sergents, et ensuite nommés sous-lieutenants. Jeunes hommes qui avaient tant à donner encore, et dont la perte, cent ans plus tard, me consterne et me consternera toujours.

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16 février 2015 1 16 /02 /février /2015 20:19

"(...) Le cierge à la main, ils avançaient à pas lourds, précédant une botte noire portée en l'air sur quatre épaules. Venue de bien plus loin que moi, une étrange épouvante me saisit, comme le savoir obscur d'une horreur que je reconnaissais sans la connaître encore. L'attente d'une catastrophe inspire ce douloureux effroi. Pauline penché sur mon front me souffla quelques mots à l'oreille : "C'est un mort", me dit-elle. Un mort ? Ça ? Là-dedans ? Des hommes et des femmes suivaient cette boîte de grand violon, si lourde et si longue. Ils pleuraient, les uns dans le mouchoir, serrant leur chapeau contre leur ventre ; les autres dans leurs voiles."

André Suarès, Marsiho, Editions Jeanne Laffitte, p. 178.

L'écureuil sur le tilleul

L'écureuil sur le tilleul

L'écureuil de l'Espe. Il était dans l'arbre près de la fenêtre à l'heure du café. Le temps que j'aille chercher l'appareil, il avait déjà mis les bouts. Je l'ai pris au jugé, alors qu'il gravissait l'un des tilleuls de l'allée, il a ensuite sauté de l'un à l'autre, merveilleusement agile comme tout écureuil qui se respecte, puis il a descendu, a regardé de loin, un court instant, - et c'est comme s'il me narguait gentiment - avant de disparaître.

La grâce que nous accordent ces bêtes de participer à leur existence même de cette façon si brève. Instant d'éclair fauve dans la grisaille du jour.

Plus tard, un sms d'une amie, son chat est mort. Même pas tout à fait son chat. Et puis un chat appartient-il à quelqu'un ? Le chat qu'elle retrouvait en tout cas quand elle retournait dans sa petite maison au bord de l'océan. Je songe alors à la petite chatte perdue quand j'avais sept ou huit ans, je voulais alors à tout prix que le paradis existât, pour pouvoir à nouveau un jour la caresser.

S'il devait y avoir un paradis, je ne comprendrais pas qu'il soit dépourvu des bêtes qui nous firent la vie plus douce.

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12 février 2015 4 12 /02 /février /2015 22:06

                                         AUBUSSON

Petite parenthèse - c'est dimanche, tu es à Aubusson

dans la Creuse.

L'automne fait tapisserie feuilles de frênes hêtres châ-

taigniers couvrant toits

D'ardoise ayant couleur de la fumée qui monte des

cheminées au feu de bois

La Creuse tu y cours aussitôt, te précipites à sa clarté

d'eau - quelle trame,

Quelle trame cette rivière qui aura lavé tant de siècles

de laines siècles de lisses (...)

 

Jacques Darras, Vous n'avez pas le vertige ? L'arbalète/Gallimard, 2004, p. 312.

L'Indre (entre Saint-Maur et Belle-Isle), détail.

L'Indre (entre Saint-Maur et Belle-Isle), détail.

Hier, le grand beau temps m'avait convaincu de ressortir le vélo, lâchement abandonné depuis octobre. Pour le grand tour de Châteauroux, parcours que j'ai mis au point minutieusement, qui traverse la zone industrielle (les plus belles pistes cyclables de la ville), rallie Cap Sud par les Grands Champs (qui ne méritent guère leur nom) avant de boucler par la Vallée Verte. Et quand un brin de courage m'enflamme, je pousse jusqu'à Saint-Maur par la Centrale. Ce que je fis hier par pure inconscience.

En effet, le sentier sur les rives de l'Indre, entre Saint-Maur et Belle-Isle, gagné sur les prés, était un enfer de bouillasse. Rapidement, la gadoue s'amoncela sur les patins de freins, et je dus plusieurs fois m'arrêter pour dépatter les roues, tel Gargantua qui, traversant la Brenne bréneuse et y secouant ses gigantesques panards, en édifia les buttons bien connus. Encore que Gargantua ne connaissait pas le vélocipède, il avait bien de la chance.

Autant dire que j'étais cuit au sortir de la plaisanterie, et c'est avec joie que je retrouvai le goudron, que je bénissai le bitume, que je me promettai d'écrire un jour l'éloge de l'asphalte. Alors que d'habitude je finissais par l'écoparc des Chénevières, cette fois-ci je coupai au plus court, mon vieux genou à la rotule usée me rappelant par ailleurs les égards que je dois à ma carcasse.

Tout de même j'avais renoué avec le sport. Il ne me reste plus qu'à espérer que le prochain mercredi soit pluvieux.

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